14 mai 2010

«Bonjour, Madame ! », « Oui, Madame ! », « Merci, Madame ! », « Aurevoir, Madame ! » ☠ « Ta geuuuule, connasse ! »



Le sujet abordé dans ce post est très sensible, en tout cas pour les jeunes femmes de mon âge, en tout cas pour moi....

Ca a commencé il y a deux ans. J’avais 25 ans et j’ai commencé à recevoir mes premiers « Madame » dans la gueule. [Oui, je vais parsemer mon propos d’un tas de grossièretés parce que le sujet m’irrite fortement, alors d’avance, pardon]. La première fois, j’ai été choquée, j’ai pensé à une erreur. Jusque là, tout allait bien, une nana zélée qui veut traiter la cliente comme il se doit et qui pour ce faire use sans modération de tournures de politesse et de « Madame » mal placés. Et puis, en devenant prof, les  "Madame" se sont multipliés. Bien sûr il y a eu ceux de mes élèves mais ils étaient dits avec tant d’ironie que je ne m’y attardais pas. Non, non, les « Madame » qui irritent, c’est ceux que vous glissent les commerçants (surtout les commerçantes, en fait), les guichetières de la SNCF et autres agents administratifs. Ils semblent anodins ces « Madame » mais ils ont le don de me gâcher la journée, la vie, tout court.

Par exemple, je sors de chez moi, fière de moi (c’est rare !) et prête à sourire à tout venant, j’entre dans un magasin pour répandre ma joie et l’amour que je porte à mon prochain et là… c’est le drame : « Bonjour Madame, je peux vous aider? ». J’oublie instantanément tous mes bons sentiments et me transforme en « dame » revêche qui en veut à la Terre entière : « Non, ça ira ! », rétorqué-je avec toute la hargne que je suis capable de manifester. Je sors, la tête haute, en me disant « c’est une erreur, voyons ! » et là, un mendiant geint « Sivioupiez, Madame ». Sans me vanter je donne l’aumône facilement, mais un « Madame » me fait cogiter quelques instants avant d’offrir le moindre de mes deniers!!! [mais c’est hOrrible ce que je raconte !]. C’est dire !

Je préfèrerais donc une grosse claque dans la gueule plutôt que de m’entendre dire « Madame » . « Madame » me fait sentir vieille conne et moche et me donne envie de rentrer chez moi immédiatement ! Je développe donc une multitude de subterfuges pour signaler à mes interlocuteurs que je ne suis pas ce qu’ils croient, et ce avant qu’ils sévissent : voix plus aigüe, contact visuel, épaules en-dedans [on en est là !]. Ca fonctionne, mais parfois je récolte quand même le « Madame » que je redoute tant.

« Mais qu’est-ce qui te dérange ? Tu as 27 ans Profetlors ! »

Oui, mais j’appartiens à une génération portée sur l'hédonisme [tout de suite les grands mots !]. Les natifs des années 80 sont de grands enfants, non ? Bien sûr, je connais quelques personnes qui assument leur statut d’adulte, mais j’en connais aussi beaucoup qui sont d’éternels ados, qui écoutent de la musique de djeuns, parlent comme des djeuns, et s’habillent comme des djeuns. Mon entrée dans la blogosphère me l’a d’ailleurs confirmé et je me sens beaucoup moins seule d’ailleurs... (merci les filles !) Et lorsqu’une connasse de 22 ans se permet de me ranger du côté da-dame de la féminité, j’ai juste envie de la prier de se la fermer ! [je vous avais prévenus, je suis trèèèès remontée]. J’ai l’impression que je n’ai plus le droit d’être cool et légère et qu’on veut m’obliger à grandir. Eh ben, noooon, je fais ce que je veux ! J’ai envie de taper dans la converse, le slim destroy, l’ipOd à donf, le « j’avoue » et l'incontournable frange, voire le serre-tête girly … pendant encore longtemps, quitte à être ridicule. Le principe c’est d’être en adéquation avec ce qu’on a au fond de soi, non ?! On ne va pas se forcer non plus !

Le paradoxe dans tout ça, c’est que les personnes de mon âge et les plus âgées hallucinent toujours quand je leur dis que j’ai 27 ans : « Nooooon ?! Tu fais plus jeune ! ». Et mes élèves : « vous avez quel âge, Madame ? »; ou quand ils ont doués d'une certaine finesse [ce qui est rare, soyons clairs!]: "Hello! How OLD are you?!". Et ce fut pire quand j’en ai chopé un entrain d’utiliser une sonnerie ultrason !!!! [Mais qu’est-ce qui m’a pris de relever ça, aussi !?] C’est à n’y rien comprendre et je te sens perdu (e ) d’ailleurs, lecteur !

Tout ça pour te dire, bien cher lecteur, qu’on nous bassine avec l’adolescence et ses turpitudes, mais personne ne s’émeut de ce qu’endure le jeune adulte, l’adolescent attardé qui ne veut pas lâcher les totems de la jeunesse mais qui se bat quand même pour être considéré comme un individu responsable et socialement inséré ; l’adulescent qui ne sait pas où se situer, quoi !.

Mais et toi, lecteur ? Te sens-tu incompris ? Et toi, lectrice, te sens-tu agressée lorsqu’on t’adresse un « Madame » ? Ou fais-tu partie de celles et ceux qui balancent des « Madame » intempestivement et impunément !? Dis-moi tout !

9 mai 2010

du conformisme en Education


Pour être prOf, chers amis, il faut être dans la norme. Un prof, c'est avant tout un être "normal", une image d'Epinal incarnée...oui...

...sauf moi!

Allons bon, qui aurait l'idée d'être prof alors qu'il est Noir?! Bon, d'accord, on en voit des profs noirs! Oui mais, oui mais... dans les ZEP, chers amis! Dans les campagnes ou dans le Sud (dont les habitants sont bien connus pour leur goût immodéré pour l'Etranger... ah les clichés... allez, j'arrête!) il n'est pas aisé d'être prof ET Noir! C'est ou l'un, ou l'autre! J'aime penser que ce que vivent les Jean-Michel et les Julie dans le 9-3 est similaire à ce que vit Mamadou ou Fatma dans le Gers ou à Brignoles: une réaction de rejet, une défiance constante, d'une part, et un besoin permanent de se faire accepter et de prouver sa légitimité, de l’autre.


Première année: collège huppé, bourgeois; un élève entreprend de m'imiter avec un accent petit nègre que ni moi, ni mon entourage n'a jamais décelé et ne décèlera sans doute jamais. Scandale, excuses publiques et malaise jusqu'à la fin de l'année.
Entre-temps, j'ai eu droit aux "Mamadou" et autres plaisanteries dont je suis censée rire, mais qui me font plutôt pleurer! Oui, je suis sensible, cher lecteur, mais je sens que tu me comprends...

Deuxième année: collège "classe moyenne"; d'entrée de jeu je reçois en guise de cadeau de bienvenue "Bamboula", suivi de "j'adore la banane" (avec un accent Antillais* pour mieux faire passer le message). Nouveau scandale et exclusion du collège pour les fautifs (ou "fils de bip!!!!" dans mon langage, mais nous savons tous qu’un prof digne de ce nom ne s’exprime pas ainsi, voyons !) Les plaisanteries n'ont pas cessé mais elles se sont faites sous cape, sournoisement.

* je ne suis pas Antillaise

Tout ceci fait que je ne me suis toujours pas sentie à ma place entre un bureau et un tableau noir. Mais d'autres facteurs entrent en jeu.

Mon physique déjà.

Ouhlala! Ca devient intéressant?!

Par physique j'entends ma taille, mes jambes, mes fesses, ma bouche, mais aussi ma façon de m'habiller. Et là, je ne suis plus une "bamboula" mais une "salOoooope!". Enième digression, cher lecteur, pour te dire que je préfère de loin être traitée de "salope!" que de "bamboula". En entendant "salope!" à la sortie du collège, j'ai eu le sentiment d'être réintégrée dans la catégorie des humains, de redevenir un être à part entière et plus une bête de foire dont on ne remarque que les différences. Des salopes, il y en a plein les rues, des Noires, des Asiatiques et DES BLANCHES! Salopes sans frontières, unissons-nous! Revenons à nos moutons. J'ai déjà mentionné ici les baskets (Converse all star light OX... oOps, pas de pub!), mais je n'ai pas encore parlé de mes slims ultra moulants, ni même de la jupe-bottes que j'ai osé mettre cette année. Je suscite donc, bien malgré moi, chez l'ado pré pubère une certaine convoitise (la "salOpe" étant l'idéal féminin des garçons de cet âge et même des plus vieux*) et chez mes collègues bienveillants beaucoup de méfiance.


*finalement, je pense que ce "salOooope!" était davatange qu'un paliatif:  c'était un compliment déguisé!! Mais oui, du style: "T'es trop bOnne, Madame!" !

Arriver au collège sans le sacro-saint cartable de prof , ça n'aide pas non plus? Et Ipod vissé aux oneilles... encore moins! Parsemer son discours de "genre", "trop fort" et "c'est clair"... encore pire!  (je précise: en dehors de l'établissement et surtout pas devant les élèves). Faire une séquence sur un film d'ados ou une séance sur "La Revanche d'une Blonde"... genre! ça frise l'inspection, ma chérie!

Je vous l'ai dit, pour être prof, il faut rentrer dans le moule: même langage, même dégaine, même humour et mêmes délires. Une secte, je vous dis! D'ailleurs c'est bien pour ça que les profs se marrient et se reproduisent entre eux! Mais et l'école dans tout ça?! Si l'école est le lieu de socialisation et d'érudition par excellence, ne faut-il pas que le savoir soit divers et varié et que la source de ce savoir soit elle-même éclectique?! Mais nous le savons tous, l'école n'est plus un lieu d'érudition, mais juste une grande crèche pour ados!

(--Tu es bien pessimiste "prOfetalors"!
-- C'est juste que j'ai perdu toutes mes illusions, cher lecteur!")

Heureusement, il existe encore des salles de profs où toutes les composantes de l'Education se mélangent harmonieusement, mes ces lieux sont rares. J'ai trouvé le mien et on m'y a arraché. Mais ne vous emballez pas, voyons! La suite au prochain épisode....

6 mai 2010

des louchées de frustration, quelques pincées de jOie et un soupçon d'aberration


TZR, c'est une fonction dont on hérite sans vraiment le vouloir. On ne le veut pas, tout simplement parce qu'on veut du bien pour soi. On le veut parce que si on ne le voulait pas, il suffisait de se PACSER (même frauduleusement) ou de se reproduire gaiement. En résumé, pour être TZR il faut être soit un psycho-rigide plein d'idéaux ringards, soitun masochiste qui veut tester ses limites.

TZR, c'est la soubrette de l'Education Nationale, avec en plus la frustration d'avoir réussi son concours et d'être Titulaire comme les autres.

TZR, c'est la possibilté de changer d'environnement de travail (de "Zone") du jour au lendemain et de s'y adapter presqu'aussi vite. Sauf, que le TZR, tout Remplaçant qu'il est, est un être humain avant tout. Mais oui! Un TZR est un être sentimental, qui a ses humeurs et ses faiblesses. Oui, oui, mais l'élève, lui, ne pardonne pas ce genre d'écarts. Quand tu es TZR, il faut être opé et vite fait!

TZR, c'est donc le "Titulaire sur Zone de Remplacement", le kleenex qui présente l'avantage d'être réutilisable, en somme!

J'ai hérité de ce statut, bien malgré moi, il y a quelques mois. Toutes mes illusions sur l'enseignement se sont évanouies d'un seul coup. J'ai goûté aux joies des réveils à 04h30 et des trajets de 5h par jour. Mais si ce n'était que ça!

Quand tu es TZR, tu peux dire adieu à la légitimité. Tu tombes dans les baskets d'un autre. Et les baskets, elles peuvent être trop petites, trop grandes et même parfois sentir mauvais. A toi de t'adapter!

Premier remplacement: Début d'année, mais une autre m'avait déjà précédée. Il faut alors rattraper le coup et tenter d'imposer sa méthode, son accent, son physique et ses bizarreries...
Durée: 1 mois 1/2.

Deuxième remplacement: Nouveau collège. Tout est en place. La remplacée a serré la vis et fait régner la terreur. Moi, j'arrive, baskets aux pieds et sourire aux lèvres. L'élève normalement constitué a envie de rattraper le temps perdu et de "se faire la remplaçante". Galère pendant des mois. Lutte acharnée pour faire comprendre que mon "approche de l'apprentissage des langues axé sur le ludique et la réalisation de tâches en fin de parcours séquentiel" (plus connue sous le terme de "cool attitude") est aussi valable que la classique. Mes nouveaux élèves m'en sont reconnaissants mais le témoignent de manière plutôt incongrue: l'indiscpline règne et mon moral flanche. Sang, labeur, larmes et sueur.
Durée: 6 mois.

Je quitte donc le navire avant qu'un troisième remplacement me soit proposé dans le même établissement. L'autorité se nourrit avant tout de la réputation. Je devais partir.

Troisième remplacement: ?

Pas de toisième remplacement pour l'instant. Deux jours après avoir contacté mes supérieurs, j'attends toujours.

TZR, c'est donc des louchées de frustration, quelques pincées de jOie et un soupçon d'aberration!

Vive l'Education!