21 sept. 2013

La réponse du Ministère au TZR


T'es prof. Mais attends, t'as combien d'enfants d'abord. Ah... parce qu'un bon prof il a des enfants, à la dizaine, tu comprends... Affaire de points... Les points, c'est tout! Sinon, je ne peux rien pour toi.

T'as le sésame? Non, pas ton concours, idiot. Peu m'importe si tu l'as eu avec brio. Ton classement, tes lauriers, tout ça m'ennuie profondément, tu sais. Moi je veux du pacs, vrai ou faux. Paie quelqu'un, tiens! T'es prof, pas Mère Theresa. Vis avec ton temps, bon sang! Je sais, on t'a dit "éthique et responsable", mais ça c'était pour faire joli. T'es pas finaud quand même. Pfffff "éthique et responsable"... La belle affaire!

Donc, tu n'es pas marié, t'as pas de progéniture, c'est grave! Faute professionnelle! Pour ta gouverne, les bons établissements sont réservés aux bons pères et aux bonnes mères de famille. Ils font de meilleurs cours. C'est prouvé.

Ton taux d'absences, moi tu vois, ça ne m'intéresse pas. Tes retards, n'en parlons pas! Ton implication, je la jugerai à la façon dont tu brasseras de l'air. Fais le bien, fais du bruit. D'ailleurs, je vais te dire, ton travail, que tu le fasses bien ou non, je m'en moque. Je veux voir tes points! Montre moi tes points et je te montrerai mes postes.

Ah.

T'as pas de points. Non, mais ce que t'as accumulé toutes ces années, c'est comme si t'avais rien. Ah non! Pas de jérémiades, si les petits nouveaux et les petits derniers te passent devant chaque année, c'est qu'eux ont accepte de jouer le jeu. Et puis t'es encore jeune. A toi la ZEP, l'APV, l'éclair et la foudre. Quelle aventure! Ça sera trépident, tu verras! Arf, tu n'enseigneras pas vraiment mais tu apprendras à crier au moins. C'est essentiel dans le métier. Et puis on va quand même pas envoyer tes collègues chevronnés là-bas. Non toi, c'est parfait! Ils ont besoin de ça ces enfants là! Jeunesse et inexpérience!

Comment ça, tu peux pas? Bon, d'accord. Le village de montagne? Ça te dit? C'est vert, bucolique. Ne t'inquiète pas, on a une chambre pour toi. Tu redescendras les weekend s'il n'ya pas trop de neige. Pardon? Vie privée? C'est quoi ce concept? T'es prof, je te dis, privilégié, assume au moins ton sacerdoce, bon sang! Et puis yen a d'autres qui le font tu sais... C'est vraiment pas pour te culpabiliser.

Et puis, tu sais quoi? Si tes pas content, mets toi en arrêt maladie! On t'en voudra pas. On a l'habitude. Je sais pas pourquoi d'ailleurs...

Quoi? Les élèves? Quels élèves? J'ai un système a faire tourner moi! C'est tout.

Au suivant!

9 juil. 2012

Fight Club






La première règle du Fight Club est : il est interdit de parler du Fight Club. Vous avez passé un concours assez compétitif et vous en êtes réduite à faire le vigile; vous ne tenez pas à ce que ça se sache, n’est-ce pas ?

La deuxième règle du Fight Club est : il est interdit de parler du Fight Club. L’accumulation de rapports faisant état de bagarres dans vos cours pourrait vous porter préjudice aux yeux de l’administration.

Troisième règle du Fight Club : quelqu’un invective ou insulte, on désamorce la situation par un trait d’humour ; quelqu’un crie, on se lève pour prévenir tout affrontement ; quelqu’un se lève, on se précipite sur les lieux pour le calmer ; quelqu’un d’autre se lève, on s’interpose, au risque de se prendre des coups [note technique : il est important de  tirer de toutes ses forces sur la main d’un des combattants pour limiter les dégâts que pourrait provoquer un éventuel assaut] ; quelqu’un donne un premier coup, on crie pour sortir les élèves-spectateurs de la torpeur et les inciter à séparer les deux combattants; quelqu’un s’écroule ou n’en peut plus, le combat est terminé : on appelle la Vie Scolaire. Echec de la médiation. Rapport en route. Administration informée.

Quatrième règle : tout individu étant considéré comme un élève peut participer au combat : les messieurs se contenteront généralement d’une joute verbale qu’ils concluront par un « Nachave ! Ta mère @ ?& » [formule qui contrairement à ce qu’on pourrait croire a valeur d’exutoire; méfiez-vous toutefois des statistiques] ; les demoiselles étant plus féroces, préparez-vous à piquer un sprint pour intervenir dans une bagarre générale impliquant une trentaine d’individus et au cours de laquelle une de vos élèves se fera tirer les cheveux et donner des coups au sol. Méfiez-vous tout de même de ces messieurs qui ont la fâcheuse habitude de traiter ces demoiselles de péripatéticiennes ou de leur tirer les cheveux ou encore de leur donner des gifles . Le sexe n’a pas d’importance. Seule la rage de vaincre compte.

Cinquième règle : un seul combat à la fois, messieurs-dames ; l’Education Nationale étant en sous-effectif, il est impossible de poster des vigiles partout et la Vie Scolaire risque de débarquer après la bataille, voire de ne pas se déplacer du tout : « ils sont débordés ».

Sixième règle : pas de chemises, ni de chaussures. Surtout les chaussures : vous risquez de les perdre en pleine rixe. Et comme vous êtes prof mais pas que, ce détail compte.

Septième règle : les combats continueront aussi longtemps que nécessaire. Les élèves se menaceront et même mises en quarantaine dans une salle voisine, les demoiselles s’évertueront à insulter tous les ascendants de leur assaillant et à égrener tous les mots grossiers que leurs 500 mots de vocabulaire comptent. Ne vous fiez pas à la robe rose néon. C’est un leurre.
Les bagarres pourront également reprendre une fois le portail franchi. Spectacle garanti : les frères, sœurs, cousins du quartier seront de la partie. Il est donc impératif que vous ne suiviez pas les élèves après une bagarre même pour éviter qu’un « drame » se produise : vous pourriez recevoir un crachat dans le dos.

Et huitième et dernière règle : si c’est votre première année au Fight Club, vous devez vous battre ! Les membres du club sont sous votre responsabilité: un oeil crevé, une commotion, c'est VOUS qui prenez. 

Bienvenue au Fight Club. 

6 juil. 2012

Paparazzi (I)






J'intitule cet article "Paparazzi (I)" parce que s'il est une chose qui agace la plupart des profs que je fréquente, c'est bien de croiser un élève alors qu'il est en civil. Ce qui est encore plus agaçant, c'est la réaction de ces mêmes élèves. Dans l'esprit d'un élève, un prof n'a pas de vie en dehors de l'établissement dans lequel il exerce. Il ne mange pas, ne rit pas aux éclats et ne fait pas de shopping. Mais il arrive aussi que les parents s'en mêlent.


Je m'explique.


Vos vacances (bien méritées, vous en conviendrez) viennent à peine de commencer. Vous êtes prof, mais pas que, alors vous faites du shopping en civil avec votre mère: short, headband et tout le toutim (mais oui, vous êtes comme ça!). Après avoir croisé quelques élèves çà et là (rien d'inhabituel...), vous tombez sur une mère d'élève - que vous appréciez beaucoup - et sa fille (l'une de ces élèves qui à eux seuls vous donnaient l'envie de vous lever pour aller enseigner). La mère, très expansive, vous salue de la main. Sourire de votre part. Cordial, franc, appuyé. Vous pensez en rester la? Non. Voilà qu'elle se dirige vers vous à grandes enjambées, talonnée par sa fille. Échange cordial, compliments sur l'excellente année de la demoiselle après que la maman (toujours convaincue que c'était votre première année) ait lâché: "J'ai dit à ma fille 'ta prof on dirait une étudiante'" (Meuh oui!) Et là, comme par magie, un retournement de situation inexplicable s'opère: "C'est votre maman?" Un long échange maternel s'ensuit sur "ce beau métier", sur vous... Paf! Vous voilà projetée 15 ans en arrière, quand votre maman croisait une autre maman en ville et qu'elles parlaient de vous alors que vous vous teniez là, les bras ballants, le sourire niais, l'air emprunté ...! Vous ne vous êtes jamais sentie aussi proche de votre élève.


Il arrive aussi qu'en sortant des cours, vous ayez une terrible envie de mini jupe noire (vous êtes comme ça, je vous dis!) Vous décidez donc de vous arrêter dans un magasin aux prix abordables... Tenez, Berschka par exemple!Votre intuition était bonne: vous trouvez exactement ce qu'il vous fallait. Quoique, elle semble un tantinet trop courte. L'essayer serait une perte de temps. Vous vous mettez tout de même dans la file d'attente des cabines. Vous avez du mal à prendre des décisions, même pour les choses les plus anodines de votre existence. Tenez! Un miroir! Vous posez la jupe sur vous pour en vérifier la longueur: tête penchée, pieds en-dedans, minauderies pour en tester l'effet sur votre silhouette. On vous observe. Un homme? Ici? Dans la file d'attente pour les femmes? Vous levez les yeux pour lui signifier que son attitude est tout à fait scandaleuse et son regard insistant déplacé. Vous n'aurez pas le temps d'armer vos yeux de tout le mépris nécessaire pour ce faire: un visage familer se dessine à quelques centimètres  au-dessusde vous, celui non pas d'un homme mais d'un garçonnet de 3ème qui a poussé un peu trop vite; la figure espiègle de Jeremy qui vous toise et lâche:


_ Bonjour, Madame! Vous allez bien?

Vous vous ressaisissez, la prof qui sommeille en vous reprend le dessus.


_ Jeremy! Qu'est-ce que tu fais là?

_ Ben comme vous, Madame, j'achète des vêtements!

Il a toujours le mot pour rire, Jérémy, le retourneur de chaises en série.

_ Ah oui... mais, Jeremy, ici ce sont les cabines d'essayage pour les femmes. Tu n'as pas le droit de venir ici. Il faut que tu descendes.

Bien joué! Le seul hic (et vous le savez bien) c'est que vous n'êtes plus en cours et que les prérogatives de Jérémy (déjà bien nombreuses en classe) n'ont plus de limite une fois le portail du collège franchi.

_ Mais si, Madame, j'ai le droit! Je viens toujours ici!

Pause.


Réflexion.

Vous décidez d'en finir. "Bon, eh bien bon weekend Jeremy!" Sourire crispé. Vous remettez l'article en place. Vous évitez soigneusement le regard de l'intrus.

A la faveur d'un long weekend, vous parviendrez presque à oublier l'incident mais le sourire évocateur de Jérémy alors qu'il arrivera en retard le mardi, vous renverra à la dure condition d'enseignant...

5 juil. 2012

Hater





Dans un précédent article, je vous promettais de vous brosser le portrait de La Sorcière de Noire-Neige et les Septs Nains, que je n'avais pas encore rencontrée mais dont j'aurais préféré ignorer l'existence. Hélas, la rencontre a eu lieu et loin d'être une légende, La Cruelle Sorcière existe bel et bien. Pour mystifier son monde, elle a choisi d'aller se perdre en une lointaine contrée dont on dit qu'elle n'est peuplée que de gentils nains qui oeuvrent sans relâche pour sauver le monde: la ZEP. C'est qu'elle est futée la Vilaine Sorcière! Qui irait donc la chercher par delà les enceintes de la ville?



Je vous rappelle que je me complaisais alors dans la posture de l'observateur, celui qui commente mais ne prend pas part aux nombreux drames qui secouent le merveilleux royaume de l'Education Nationale. Mais la redoutable Sorcière aux longues griffes manucurées m'y a précipitée sans même que je puisse lui résister. Le charme a été rompu! Fini le conte de fées!


Cette sorcière, je la déteste tellement, que lorsque je la croisais dans les couloirs j’avais envie de… @ ? & % . Non, restons civils. Je la déteste tellement que lorsque je la croisais dans le couloir j’avais envie de la provoquer en duel afin qu’on en découse dans la cour et qu’on en finisse une fois pour toutes : elle, transpercée par ma fine lame, la langue pendante, l’œil vitreux. Oh ! Voilà que ça recommence !

Mais pourquoi tant de haine ?! Je sens une pointe de réprobation dans la manière dont vous déchiffrez ces mots. Vous vous dites que je l’ai bien mérité hein ! Eh bien détrompez-vous ! Cette collègue a été la collègue la plus malveillante, n’ayons pas peur des mots, la plus méchante qu’il m’ait été donné de rencontrer.

Je suis sûre que vous connaissez des personnes de cet acabit : vous savez celles qui veulent toujours parler plus fort que les autres ; celles qui occupent l’espace en permanence ; qui rayonnent par leur vulgarité ; dont l’incompétence n’est plus à prouver ; qui jouent les fausses rebelles pour attirer l’attention sur elles ; qui passent d’un extrême à l’autre en moins de temps qu’il faut pour se retourner quand on écrit au tableau et qu’on sent une agitation inhabituelle dans son dos ; qui, en parlant de  dos, cassent du sucre sur le vôtre dès que vous l’avez tourné, sans raison, par pur plaisir. Mais oui ! Vous en connaissez des personnes comme ça. On en connaît tous ! Dans la mythologie urbaine, on appelle ce genre de personnage « hater ».

Il s’avère que cet être de peu de classe enseigne la même matière que moi. Et pour ce qui est de l’incompétence elle en connait un rayon : insultes à élève, lacunes avérées de ceux qui sont passés entre ses mains, fautes d’orthographe inimaginables… Ce hater-là, comme tous les haters en somme, s’est senti menacé par ma personne dès le début de l’année et s’est donné pour mission de me traquer et de me faire craquer. Comme vous le savez, j’étais en Zone Sensible. Et en plus de la donnée « élèves atypiques » (euphémisme quand tu nous tiens !) et de la donnée « parents en colère », il a fallu que je compose avec la nature caractérielle de ce détestable personnage dont la jalousie maladive et l’obsession incurable ont pris plus d’importance à mes yeux que les nombreux problèmes de discipline de mes élèves. Comme si j’avais intégré l’Education Nationale pour retrouver l’ambiance cat-fight des bureaux : car Madame tenait régulièrement en salle des profs des conférences de presse à mon sujet à l’occasion desquelles elle débriefait mes cours. Elle intervenait dans ces cours pour châtier mes élèves, comme si la vingtaine de charmants bambins qu’elle avait à se mettre sous la dent ne suffisait pas à satisfaire son appétit d’ogre. Et lorsque je lui demandais d’arrêter, elle montait sur ses grands chevaux et criait au scandale. Enseigner c’est aussi être le chef dans sa classe (et tous les cinq ans recevoir la visite d’un gentil Monsieur qui vient vous dire que c’est bien mais que ça pourrait être mieux). Eh bien, je n’étais plus le chef : je me sentais épiée en permanence, tous mes faits et gestes étaient calculés avec minutie pour que la conférence de presse qui aurait lieu deux étages plus bas soit la plus brève possible.

Je vous le dis, il y a bel et bien des haters dans l’Education Nationale, des personnes dont on se demande comment elles ont obtenu leur concours (« Incorrect, ça prend un ‘r’ ? ») et qui le savent tellement qu’elles déversent leur haine sur tous ceux qui leur rappellent à quel point elles sont nulles.

C’est ainsi que s’achève mon émouvant hommage à celle qui a été mon bourreau pendant 8 mois, la chef de file des haters de l’Education Nationale, un gang dont j’espère qu’on saura juguler la prolifération. A coup d’arrêts maladie par excès de pression (mon mépris, l’indignation des autres collègues et de certains parents), on devrait pouvoir y arriver ! Comme quoi, il y a une justice ; même dans l’Education Nationale ! Et comme le dirait un de mes disciples : « Elle s’est fait maraver, la paille [sic] »
O_O

Et vous donc? Avez-vous déjà eu affaire à des haters dans le milieu du travail (ou ailleurs)? Dites-moi tout!

25 oct. 2011

La ZEP







Ma carrière a atteint son apogée. J'ai l'honneur et l'immense privilège d'exercer en ZEP. Après trois ans de carrière de TZR je vis cette nouvelle affectation comme une consécration. Un prof digne de ce nom, aussi particulier soit-il, ne peut se passer d'une affectation, aussi brève soit-elle, en Zone d'Education Prioritaire. La mienne ne sera pas brève, ce qui rend cet exploit d'autant plus remarquable.

Trève d'ironie.

Exploit. C'est le terme. Après six semaines de travail, que dis-je, de bataille acharnée, je suis tout simplement EXTÉNUÉE. En six semaines j'ai vu tout ce à quoi trois ans d'une carrière déjà bien mouvementée ne m'avaient confrontée.

Le quotidien est rythmé de provocations, de menaces à peine voilées, de cris (de ma part et de la leur) et surtout de médiocrité. A tous les niveaux, l'on cotoît la médiocrité. Celle des élèves ne leur est pas entièrement imputable: ils évoluent dans un univers où on les infantilise en permanence; on ne s'attend pas à grand'chose d'un élève de ZEP alors dès qu'on l'obtient on en fait des tonnes: 17 de moyenne, les félicitations, le statut très enviable de "bon élément". "On peut l'envoyer au lycée, lui!" Et là c'est le drame!

Mis à part ce goût prononcé pour la complaisance, cette course effreinée à la réussite artificielle et cette démagogie institutionnalisée, quelques éléments ont retenu mon attention.

Le langage.
En ZEP, il faut s'adapter vite. Y aller physiquement, répéter, répéter, répéter, menacer, mal parler. Faire des fautes aussi. Les élèves disent "Madame, c'est pas bien ce que vous faisez!", puis poussent un tchip de mépris, avant d'ajouter "Vous nous disez qu'on est paresseux alors nous on va pas réussir dans la vie! Faut nous encourager un peu!" Et puis il faut oublier le sacrosaint "Très bien!". On dit "Bzahtek!" ou rien. En parlant de ça, la tendance à la caricature "raciale" est aussi présente qu'ailleurs: "Les Noirs tous des esclaves!" par ci! "Mamadou avait mal aux dents" chantonné par là! Les accents petit nègre et les traditionnelles références à la "banane" sont une spécialité locale!! Dans tous les cas, le seul moyen de s'en sortir est bien sûr de feindre qu'on n'a rien entendu. Tout le monde est content, la pression est relâchée et le cours peut continuer.

La segpa *
Avoir des segpa, c'est un exploit en soit.  Au bout de deux semaines seulement on se retrouve à séparer deux élèves qui se battent à coups de poing et se promettent les pires atrocités. Entendre un enfant de 11 ans dire "je suis capable de tuer moi!" ça fait réfléchir. Etre obligée de retenir un enfant de 11 ans qui a assez de détermination pour en découdre avec un camarade, avec la ferme intention de lui faire mal, c'est dur physiquement et moralement. On assiste ainsi a sa première bagarre, et pas qu'en tant que spectateur; et on vous promet que ce ne sera pas la dernière! Du coup, on vous regarde comme une petite naïve (ça va, j'ai l'habitude), qui n'est pas au bout de ses surprises: "Elle va en baver la petite!"


La rencontre parent-professeur inopinée.
Deux élèves s'invectivent en classe. Le résolution du conflit est reportée à la fin du cours. Hélas un des protagonistes se fait la belle. La résolution du conflit est reportée au lendemain 8 heures: on est mercredi, il est midi, les établissements s'arrêtent de vivre. Jusqu'ici, tout va bien. Le lendemain en allant chercher ses classes on perçoit des éclats de voix dans le hall, un séisme sonore se produit. On s'approche de l'épicentre: on distingue un femme hystérique et à ses côtés un des protagonistes. Il s'agit de la mère de ce dernier qui vient s'enquérir de l'incident de la veille. Des têtes doivent tomber, tout de suite, maintenant! On est happé soudain car le protagoniste s'est écrié: "c'est elle!" Alors un déluge de cris et de postillons s'abat et vous fige en la posture du spectateur, celui qui n'ose rien dire de peur d'aggraver la situation, de s'exposer, de déborder; on subit, les yeux écarquillés, la bouche ouverte (je rappelle que les postillons pleuvent). Un supérieur vous demande d'aller chercher vos élèves. Il est trop tard: tous ont assisté à cette crucifixion publique, éleves et collègues. Vous ne tarderez pas à recevoir des menaces d'élèves qui comptent eux aussi faire venir leurs parents pour vous faire céder. Vous ne tarderez pas à verser quelques larmes en salle des profs histoire relâcher la pression. Vous ne tarderez pas à perdre toute envie de travailler avec ces gens. Vous êtes en ZEP.

Premier article rédigé depuis mon téléphone portable

29 oct. 2010

Noire-Neige et les Sept Nains


 


Imaginons que nous sommes dans un bon vieux Disney. Je suis Noire-Neige (eh oui, il ne peut en être autrement et les antithèses me plaisent bien). Dans mes pérégrinations éducatives et les royaumes pédagogiques que je visiterais, je serais amenée à rencontrer une Sorcière (mais cela fera l'objet d'un autre article, patience!) mais aussi et surtout Sept Nains, sept personnalités bien distinctes qui font tout le charme de l'histoire... ou pas:

1- Le Padre ou la Madre: il s'agit le plus souvent du prof chevronné, du baroudeur averti, aux mille et une mutations. Celui qui connaît le système en long, en large et en travers. Il se fera une joie de t'en expliquer les rouages. Il se risquera souvent à te prodiguer conseils en tous genres et mises en garde de toutes sortes. Pour lui qui a roulé sa bosse et qui n'a plus beaucoup d'illusions, tu es une bouffée d'air frais, un vent de fraîcheur dans son monde naphtaliné. Il aime ton ingénuité. Il s'en joue. Il te sort des plaisanteries et des calembours dont seuls lui et les natifs d'au moins 1965 peuvent saisir la teneur (souvent ses propos revêtent un caractère sexuel, mais tu es bien trop jeune pour le comprendre - du moins, tu fais semblant). S'il est pépé... euh, P.P.* de ta classe de quatrième agitée, estime-toi heureuse, car même s'il te fait gentillemnt sentir que tu lui arrives à la cheville, il fera tout pour sauver la face de la jeune ingénue que tu es... L'autorité dont il se drape irrite souvent certains de ses collègues et des escarmouches peuvent s'ensuivre, mais ça, c'est une autre histoire.

nda: il s'agit d'une espèce en voie de disparition, mais susceptible de connaître un essor prochain grâce à la Réforme des Retraites. A la bonne heure!

2- Le Baba Cool: vestige des années yéyé, ce specimen abonde dans certaines salles des profs. Il se déplace souvent écharpe (rouge, multicolore, voire rose - véridique) au cou, sourire béat aux lèvres et dégueule sa joie de vivre dans les couloirs et dans la salle des profs. Cher lecteur, ne te laisse pas tromper par le caractère acerbe de ce portrait: je m'entiche facilement de ce genre de personnages sans lesquels le quotidien serait bien morose. Tiens, en conseil de classe, le Baba Cool ponctue toutes ses interventions d'un trait d'humour dont la délicatesse en ravit plus d'un et parfois irrite certains (notamment le chef d'établissement... hum). Le Baba Cool est souvent un prof d'Arts Plasqtiques, d'Anglais ou de Français (mais rarement un prof de maths ou de physiques, soyons clairs), il mange bio et bien sûr il a fait Mai 68!

3- Jean Blaguin: les adeptes du SAV savent à quoi je fais allusion. Jean Blaguin, c'est le prof dont le passe-temps favori est le jeu de mot à gogo. Jean Blaguin sévit dans les lycées et les collèges de France et de Navarre. Jean Blaguin blague et il veut que tout le monde le sache. Jean Blaguin est facilement reconnaissable. Salle des profs. Pause déjeuner. Une dizaine de profs sont réunis autour d'une table. Ils ont fini de se substanter. Ils ont une conversation animée sur les bébés (si l'auditoire est à majorité féminin) ou sur le climat politique actuel. Au bout de la table, un homme est assis, un bras sur l'autre; ce même bras dont la main caresse des lèvres pincés. Les yeux sont rivés sur un coin de table. L'air est sérieux. Cet homme, c'est Jean Blaguin qui s'apprête à frapper. Cela fait maintenant 1 mins et 34 secondes que Jean Blaguin, J.B. pour les intimes, le rumine son jeu de mot. Et là sous les yeux ébahis du public, il lâche son jeu de mot qu'il a soigneusement enrobé de cynisme ou d'humour noir, voire scabreux. Deux réactions sont alors possibles: la consternation mêlée d'un pointe d'agacement ou d'un soupçon de pitié, pour les blasés. OU le rire frénétique et irrépressible,précédé de deux ou trois secondes de consternation, pour l'ingénu. Avec moi, Jean Blaguin a un public conquis d'avance, pour sûr! Note qu'il s'agit le plus souvent un prof de maths, de physique, voire d'histoire-géo et qu'il a souvent l'échine courbée par le poids de son humour.

4- Le Prof Parfait: Le prof parfait est agaçant. Il sait tout, fait tout, réussit tout, partout, tout le temps. Le Prof parfait ou pp (car il est souvent P.P.*, en plus; orthographié ici avec des minuscules, car je le laisse s'attribuer les majuscules tout seul). Le pp, donc, est peu modeste: il se fait sa propre réclame et tient à faire savoir à ses collègues à quel point il est tellement meilleur qu'eux. C'est d'ailleurs pour cela que je ne m'étendrai pas sur son cas. Ses élèves (selon lui, du moins) le vénèrent et se battraient pour aller en cours avec lui. Tu ne sais pas te servir du T.B.I.*? Le prof parfait, lui, il sait! La 4ème H t'épuise? Le pp, lui, il la trouve géniale et c'est réciproque. Tu es claqué le 18 décembre à 15h45? Le pp, lui, il en redemande car il aiiiiiiiiime son métier. Le pp, c'est surtout celui qui n'a rien d'autre à faire dans la vie ou dont l'horizon intellectuel et culturel est assez limité (oui, oui, c'est paradoxalement souvent le cas). Pour lui, l'enseignement et la clé de voûte de l'existence. Il y croit tellement, que tous ceux qui l'entourent y croient aussi. Même toi, tu vas finir par y croire.

5 a - Le Grincheux: il en faut! Et dans l'éducation nationale, il y en a! La question est de savoir si le grincheux est grincheux de nature ou s'il a acquis sa "grinchite" aiguë avec le temps et au contact des "apprenants". Souvent, il s'agit d'une condition qui s'acquiert avec le temps. Le grincheux n'est jamais content; il ponctue toutes ses interventions d'une pique; il injurie les élèves copieusement (en salle des profs, pour éviter le procès, quand même; grincheux mais pas téméraire) et parfois même il n'épargne pas ses "chers collègues et néammoins amis". Il entre sans saluer. Sort en claquant la porte. Mais le grincheux a une qualité: dans son cours, c'est le calme plat. Le public a su s'adapter et sachant ce qu'il encourt, il préfère reporter son défoulement à plus tard (de préférence pendant le cours de la stagiaire, celle qui ne sait même pas crier). C'est bien pour cela que le statut de Grincheux me tente bien. Lui au moins, il a la paix.

Mais il y a une sous-catégorie au Grincheux: 5 b- Le dépessif. Attention! Un moment d'émotion va suivre. Souvent le Grincheux cache un dépressif en devenir; celui à qui le système ne convient plus; celui qui se sent persécuté; celui qui se mue peu à peu en fantôme et dont tout le monde sent bien qu'il va bientôt craquer, mais pour qui personne ne fait rien; celui dont la voix peut sembler lente, paresseuse, mais qui en réalité étouffe un sanglot à chaque propos; celui qui ne fait même plus d'effort pour être présentable, qui traîne sa douleur d'être prof en même temps que son cartable chargé d'aigreur et de regrets. Aigreur et regrets alourdissent son corps et il finira certainement par craquer. Ce prof, je le comprends tellement, même si la plupart du temps les jeunes loups ont la dent dure et préfèrent croire que tout ce qui lui arrive lui est entièrement imputable. C'est aussi pour celui-là que nous autres TZR* oeuvrons dans la plus grande précarité. Ils sont notre fond de commerce, à mon grand regret.

6- Mère Courage et ses enfants: elle en a trois (une famille nombreuse, en France... une ébauche de famille en Afrique). L'aînée fait de la danse les lundis et vendredis après-midi, le benjamin fait de l'escrime le mercredi. Quant au cadet, il adore dessiner sur les copies de  sa maman de temps en temps. En parlant de dessin, elle met régulèrement sur le panneau d'affichage les croûtes de sa progéniture. Elle va même jusqu'à les amener certains après-midi, ce qui provoque, bien sûr, chez les élèves comme chez les profs (moi y compris), une salve de "oooooooh! comme il est mignon!" Elle fait partie du fameux gang des mères pas très anonymes qui égayent nos déjeuners de leurs histoires d'accouchement, d'alaitement, de "popos" ou de nounou. Elles polluent notre atmosphère de leur mièvres considérations maternelles. Et surtout, pour tout TZR, elles rappellent que si nous changeons d'établissement tous les trois mois, c'est pour qu'elles puissent accoucher, allaiter et pouponner leurs petits trésors en paix. Vive la mternité!

nb: une fois de plus, le caractère acerbe de cette description cache la réelle admiration que j'ai pour ces femmes qui savent jongler avec tant de choses! Mais zut quand même!


7- Sssssssexy Teach' (oui je sais, c'est nul, mais j'assume!): Il fallait terminer en beauté. Il y a deux variantes de Sexy Teach': la Sexy Teach Light et la Sexy Teach Gratinée. Ce qui vaut pour la première vaut pour la seconde, mais l'inverse n'est pas vrai. Il n'y a pas de mal être une Sexy Teach' Light. Sexy Teach' Light ne se laisse pas aller, bien au contraire. Sexy Teach' Light, tu ne la verras jamais arborer la même tenue deux fois dans la même semaine. Sexy Teach' Light ose tout: le slim, les talons, la jupe, le décolleté. Sexy Teach' Light fait le bonheur de son entourage masculin et oripille la gent féminine. Mais Sexy Teach' Light assume. Sexy Teach' Light, c'est la Barbie girl de l'Education Nationale, en plus trash, parfois. Oui, parfois, Sexy Teach' tombe du côté vulgaire de la force glamour. Et c'est là que Sexy Teach' Gratinée fait son apparition. Là où je vis, elle a les lèvres cernées de crayon, le mascara alourdit ses longs cils et des talons vertigineux viennent agrémenter sa silhouette généreuse. Elle ose la firrrrrrrire (fourrure); un jean ultra moulant entrave le moindre de ses mouvements langoureux (au point que tu lui mates le derrière en te demandant si ses élèves arrivent à se concentrer en notant la trace écrite*). Là où je travaille Sexy Teach' Gratinée a un rire tout aussi gratiné: un tiers sorcière, un tiers Eva Longoria, et le reste, Zahia. Un rire qui défraie la chronique, lorsqu'entourée de messieurs envoûtés, elle se fait payer une barre chocolatée à la machine. Sexy Teach' Gratinée déconcerte ses collègues; même Sexy Teach' Light est dépassée mais elle oublie qu'avec Sexy Teach Gratinée dans les parages, la tenue la plus osée passe inapperçue. Eh oui! Sexy Teach' Gratinée flirte avec un collègue, un surveillant, un parent d'élève, une chaise, un tableau? Oh! Et puis,  temps que ce n'est pas un élève...! Sexy Teach' Gratinée est SSSSSSEXY, et puis c'est tout!

Quant à moi, je ne saurais classer. Je sais, ce n'est pas du jeu. Mais qu'y puis-je, voyons?! Je te rappelle que je suis Noire-Neige: je suis un peu de tout et un peu de rien. Pour l'instant, du moins.

Mais dis-moi, connais-tu d'autres styles de profs? Lesquels préfères-tu? Dis-moi tout, je suis toute ouïe.



Contrairement à ce que je préconise à mes élèves, je ne me suis pas relue. Même les profs font des fautes. Sois donc indulgent, lecteur bien-aimé.

26 oct. 2010

Nouvelles résolutions


Je sais, nous ne somme pas le 31 décembre, minuit. Mais que voulez-vous? je suis décalée, un point c'est tout. Voilà, j'ai pris de nouvelles résolutions. Et elles concernent exclusivement ce blog. Parce que ma vie est un tel chantier que j'ai abandonné l'idée de formuler quelque résolution que ce soit la concernant.



J'ai décidé d'être plus assidue. Cela fait maintenant quatre mois que je n'ai rien posté. C'est un scandale voyons!



J'ai décidé de faire les choses bien. Mais décider est une chose; y arriver: n'en parlons pas! Pour ce faire, je me suis lancée dans la confection d'une nouvelle banière. Un scandale, là aussi! Je ne suis pas une fille méticuleuse. Alors, faire des photos, "les retoucher" (les guillements sont à traduire par 'faire semblant de'), "les agencer", décider de la bonne couleur, s'arranger avec Blogger... c'est tout simplement ENORME pour moi. Tout ça pour finir par constater, au bout de minutes de dur labeur, que j'ai fait une faute d'orthographe! (Saurais-tu la trouver, public en délire?). Belle publicité pour un blog de prOf ! Belle leçon pour la perfectioniste que je suis (Oui, oui, je vois ta moue dubitative, mais oui, on peut être perfectionniste et pas méticuleuse pour un sou... Si si, ça arrive... qu'à moi bien sûr, mais ça arrive quand même).



Mais à la réflexion, le nouveau titre n'est-il pas "Une prOf particulière"? Je suis donc "particulière": je suis une prOf qui se permet l'étourderie et le manque de rigueur. Ben voilà! Je la tiens mon excuse pour ne pas tout recommencer!



Et enfin, les considérations esthétiques enfin dépassées (mais n'étant toujours pas satisfaite, au passage), j'ai décidé d'exposer ici toutes les anecdotes dont mon métier regorge. Toutes, j'ai dit! (On attire le chaland comme on peut, sur cette foutue blogosphère saturée)



Sur ce, je te laisse et te donne rendez-vous pour de nouvelles aventures (... enfin, quand j'aurai le temps...)